Juan Ignacio Cardal, dit Mercoeur

Juan est né à Séville, dans une bonne famille de l'aristocratie marchande, où il reçoit une éducation digne de ce nom. En bon jeune hidalgo, il rève de gloire militaire et de grandes découvertes, de dilapider sans vergogne la richesse de son père, fier armateur qui n'a jamais mis un pied sur un seul de ses navires.

Malheureusement, comme souvent dans ce genre de destinée, un jour la fortune a tourné. Oubliés les songes de victoire dans de lointains archipels. Pour subvenir au quotidien, Juan se retrouve à turbiner dans les services de cartographie de la célèbre Casa de Contratacion. Malgré le travail fastidieux et répétitif de copiste, il n'arrive pas à abandonner complètement ses ambitions.

Quelle aubaine ! La Compagnie, comme on l'appelle, est toujours à la recherche de jeunes gens prometteurs, mais désespérés, pour accomplir ses basses besognes. Espionnage, chantage, menace, délation... la Casa de Contratacion propose tout un éventail de tâches peu reluisantes pour ceux qui ne se soucient guère que de soupeser une bourse de réals bien rebondie à la conclusion.

Quel prestige de parader sur les boulevards de la plus grande cité du monde en jouant des coudes aux côtés des maîtres des lieux, que les marins comme les marchands croisent en tirant le bonnet et en balbutiant un modeste "senor".

Jusqu'à cette fâcheuse histoire de peste... Satanées épidémies, toujours une calamité pour la main d'oeuvre dans les bidonvilles du port. Et les quarantaines... Des pertes colossales pour navires et armateurs qui manquent leur départ. Heureusement, dans ces circonstances, on peut compter sur des personnes pleines de ressources pour négocier avec les fonctionnaires sanitaires de notre bon seigneur Roi, qui n'ont pas peur du regard de Dieu et qui sont toutes dévouées aux finances de la Sainte Casa de Contratacion...

Puis un jour, le pot aux roses est découvert... et il faut des boucs émissaires.

Pour sauver sa peau, Juan Ignacio Cardal a finalement embarqué pour ses archipels rêvés, mais ses aventures y sont bien moins glorieuses que dans ses songes, et sans doute encore plus dangereuses.

Pour se racheter au yeux de son roi, de la Compagnie et peut-être au regard de Dieu, il manigance avec les pires fripouilles, déguisé sous les traits de l'ennemi, prêt à tout risquer pour que le flot d'or sacré ne cesse d'abreuver la grande prostituée du Guadalquivir, et puis son roi, et puis son dieu.

Un jour peut-être, il débarquera à nouveau sur ses quais, couvert de gloire. Après tout, on a connu des héros qui échappaient à la Casa de Contratacion, voire à notre seigneur Roi et même à la justice de Dieu. Par contre, aux trois à la fois...