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 La Vie dans les Montagnes

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Aidoneus
Philippus Grosbillus
Aidoneus


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MessageSujet: La Vie dans les Montagnes   La Vie dans les Montagnes I_icon_minitimeVen 25 Fév - 16:43

Mes premiers souvenirs sont ceux d'une bête traquée. Je me souviens du sang des larves, trouvées grouillant sous les racines, qui me permettait de maintenir en vie ce corps chétif, abandonné, sans âme et sans langage, à peine capable d'échapper aux nombreux prédateurs qui le menaçaient. Mais je me rappelle aussi cette volonté tenace de survivre, alimentée par l'énergie impie qui bouillonnait dans mes tréfonds. Grâce à elle, j'ai renforcé et fait grandir ce corps qui, quoique toujours inhumain, devenait au fil du temps un instrument plus efficace. J'absorbais toujours plus d'énergie vitale, pompée dans les fluides et les chairs des proies plus conséquentes que je pouvais désormais saisir.

J'étais toujours une victime, mais je devenais bourreau.

Je me souviens du froid et de mes propres cris, du choc de mes os encore malléables sur les rocs et des ronces qui déchiraient mes chairs tendres, de leurs hurlements à glacer les veines. Je n'ai compris que plus tard pourquoi elles m'avaient arraché au sein doux et chaud qui m'avait donné la vie, et je leur en ai fait payer le prix.

Bientôt, elles ont fuit devant moi. Toutes ces odeurs, ces pistes que pendant longtemps j'évitais comme un danger. Je sentais les germes de leur peur dans les traces de sueur rance qu'elles laissaient devant mon passage. Brimé et humilié, j'ai pendant longtemps souillé cette terre de mes fluides : aujourd'hui je fais couler les leur, et je m'en nourris, comme une plante carnivore des sucs de sa proie piégée, sans défense, lentement digérée.

Un jour, pourtant, une senteur nouvelle est apparue. Fragrance familière mais néanmoins nouvelle. Intrigante et effrayante à la fois. J'ai usé de tous mes tours, mais ne suis pas parvenu à l'intimider. Je ne peux même plus l'éviter. Je la sens chaque nuit plus proche, dans la mousse, sur les arbres et sur les rochers. Elle se rapproche et va m'attraper. Je ne peux plus me cacher.

Elle ressemble aux figures qui ont contemplé mes premiers pleurs, qui m'ont accueilli pour de suite me rejeter. Je sens revenir la haine et la soif de mort : je sens cette dette impayée qui m'anime et m'obsède. Je dois obtenir une part de mon tribut. Je sens aussi ce pouvoir dont j'ai été spolié. Je perçois cette maîtrise qui m'a été refusée : celle dont je sais qu'elle est la clé, l'issue de ma métamorphose, le socle de mon pouvoir. Je veux la prendre, la voler, l'arracher. Mais l'histoire se répète : une fois encore je suis faible, dépassé, abattu.

Je réapparais de nouveau, pourtant, toujours porté par le souffle impur qui enfle sans cesse en moi et me réchauffe en même temps qu'il me transit. Assailli par des tourbillons de visions et de senteurs inédites : je ne reconnais plus rien, je veux m'échapper. Mais je sens une nouvelle chaleur qui me réconforte. Je revis mes premières heures, mais cette fois, malgré mes craintes, je ne suis plus repoussé. Je suis né.

Megatheia m'a appris à parler. Cela m'a transformé. Je découvre le pouvoir que les mots me confèrent, grâce à mon Don, sur les choses qui m'entourent. Cette maîtrise que je cherchais, elle commence à m'appartenir. Je découvre les différences entre les hommes et les bêtes. Je ne les attaque plus indistinctement. Je mange de la nourriture calcinée, de l'eau gâchée. Bien longtemps après ces premières années dans la vallée d'Erebos, je garderai la nostalgie de la viande fraîche, des tressaillements d'un foie tout juste extirpé de son enveloppe parfumée.

Je suis un enfant civilisé, désormais. J'ai une mère, Megatheia et une sœur, Destasia. Pour mériter leur affection, je dois m'exiler. Ça n'a aucun sens pour moi, mais je ne veux pas être encore une fois renié. J'obéis.

Je ne comprends rien à mes camarades de Polyaigos. J'ai essayé d'en tuer un, il m'avait frappé avec un bâton. Maria m'a battu pour avoir essayé de manger son œil. Ça n'a pas d'importance : au printemps, je retourne dans les montagnes.

Maintenant, je connais les Arts. Je m'évade dans les monts du Pinde et je cherche le Cercle. J'ai soif du sang des sorcières. Je sens qu'une part de leur pouvoir m'échappe, en dépit des enseignements de Megatheia et Destasia. Je reviens penaud, blessé. Pendant des mois, torturé par les maléfices des sorcières qui ne me laissent aucun répit. Megatheia part dans les collines et, quand elle revient, je ne sens plus rien. Je sais qu'elle leur a arraché le cœur, je l'en ai supplié. Je ne peux plus y retourner tant que je ne possède pas la Parma Magica.

Ma mère s'absente de plus en plus souvent dans les limbes désormais, et les autres sorcières ne m'acceptent pas. Heureusement, il reste Destasia. Megatheia lui a laissé la responsabilité de poursuivre mon apprentissage, car elle est un peu plus âgée que moi. Après l'épisode du Cercle, je suis devenu beaucoup plus docile et sociable. Et je crée des liens avec Destasia : elle est ma nouvelle mère, ma sœur, mon amante, ma fille. Nous explorons ensemble les vallées et elle m'enseigne les pratiques ancestrales de son culte. Leurs traditions sont tellement plus riches que celles de l'Ordre, aseptisées, tronquées, oubliées.

Je hais l'Ordre et tout ce qu'il représente. Mais je me garde bien d'en parler. J'aide les autres sorcières à accomplir leurs rites. Je leur rapporte des ingrédients et du Vis. Je leur montre mon dévouement aux coutumes et aux dieux d'en bas. Désormais, je suis des leurs, malgré mon sexe qui les rebute. Peu m'importe : je leur appartiens et elles sont miennes. Nos destins sont connectés, indissociables. Nos vies sont mêlées, comme nos ancêtres l'ont voulu. Nous ne sommes que les membres disparates d'un seul Cercle, sans valeur quand il n'est pas réuni.

Au dernier retour de Megatheia, nous nous rendons au Tribunal. Je possède la Parma Magica, mon pouvoir est complet. J'embrasse Destasia, car je vais partir dans les montagnes pendant quelques temps...

Les Filles d'Erichtho ont été une menace de plus en plus importante pour l'alliance, ces dernières années. Je vais mettre un terme à tout ça. Je vais réconcilier les deux visages de mon pouvoir. Peu importe combien je dois en tuer avant qu'elles me livrent leurs secrets. J'ai d'abord retrouvé celle qui m'a donné le jour et m'a transmis, avec son amant bestial, la force du monde chthonien. Sur un autel de ronces et de pierre noires, dédié à Hécate et Hades, tel que mes mater me l'ont enseigné, j'ai pris son cœur et m'en suis gorgé, absorbant son savoir. Le reste, je l'ai dédié à tous les esprits et aux dieux de l'en-bas. Cette clairière et mon autel sont désormais sanctifiés : je vais pouvoir y poursuivre mes recherches et développer mes capacités.

Je retrouve ces sensations bénies de la fin de mon enfance, quand je dominais mon environnement, tel un prédateur sauvage. J'arpente ma vallée et mes montagnes. Je veille sur mes sœurs, en particulier Destasia. Elle travaille beaucoup ces derniers temps et m'oublie un peu. Ce n'est rien, je l'aime et ferais n'importe quoi pour elle. Elle est mon sang et je suis sa vie. Je veille sur les environs et je concerte avec les Amantes de la Lune. Je les protège des envahisseurs et des mages qui les menacent ; elles m'enseignent les secrets qu'elles n'ont jamais voulu partager avec leurs cousines reniées.

Je n'ai jamais été un mage de laboratoire. Je me suis fendu, pourtant, un jour, d'un petit traité. Un exposé sur les Sabbat et les connaissances antiques des Servantes d'Hecate, leurs traditions qui plongent leurs racines dans les fondements du temps. Ça n'a pas beaucoup marqué les membres de l'Ordre, qui restent coincés dans leur théorie systématique et artificielle. Ils ne comprennent rien au vrai pouvoir, aux liens qui nous relient à chaque chose, à leur vie et à leur mort, au chaos qui en découle, à l'équilibre instable qui est le destin du monde. Ces imbéciles pensent pouvoir tout ordonner, tout contrôler. Mais c'est là justement notre rôle, à nous, Descendants de Viea et d'Erichtho : nous sommes là pour leur montrer comme ils ont tort. Oh oui, combien ils ont tort...

J'arpente donc les vallées, comme un berger veillant sur son troupeau : c'est d'ailleurs l'apparence que, depuis quelques années, j'ai choisi d'adopter. Insoupçonnable et pourtant symbolique : un réceptacle pour l'énergie et le pouvoir du monde. C'est quelque chose que j'ai appris des Servantes de la Lune. A leur manière, je circule plutôt la nuit. A ma guise, je bénis ou je maudis toute chose ou tout être que je rencontre. J'entretiens le tumulte du monde. Parfois, je sauve un berger de la menace des loups, parfois, profitant de son absence je précipite ses enfants du haut d'un pic. Et ils nous révèrent pour cela. Car ils savent que leur sort leur échappe, qu'il nous appartient : à nous et aux dieux qui nous ont chargé de les représenter.

Lorsque les affaires des vallées se font calmes ou ennuyeuses, je m'aventure parfois le long de la Via Egnatia, qui traverse toute la Grèce et la Thrace, jusqu'à Thessalonique ou même Constantinople. C'est comme ça que j'ai résolus de prendre en charge ce gros marchand, Imanitos Mendax, après l'avoir trouvé, une nuit, perdu et sanglotant au milieu du Cercle hilare. Depuis la venue des barbares francs, il m'aide beaucoup. Ces chiens galeux sont le pendant vulgaire de l'Ordre : en encore plus dégoûtant, si c'est possible. Les faire crever à petit feu : un plaisir sans cesse renouvelé.

C'est pour ça que j'ai utilisé les derniers rôdeurs bulgares que nous avons trouvé pour aider les Filles de la Lune à donner naissance à Nika. Belle créature, qui nous apportera l'aide nécessaire dans le rôle décisif que nous nous devons de jouer dans la Chute de l'Empire des Chiens.

C'est à la même époque que j'ai rencontré le Criamon. A ce moment, nous connaissions beaucoup de problèmes avec les Maîtres des Bêtes et les Bjornaers ; ces sauvages servent les Tremere qui persécutent les sorcières des Montagnes. Discremen est beaucoup plus amusant que les autres membres de sa Maison que j'ai pu croiser : il apprécie presque autant que moi se gausser des corps tailladés, brisés, de nos tristes opposants. Les choses ont tout de même failli mal tourner avec les Bjornaers. Discremen s'est battu avec l'un d'entre eux, plutôt qu'avec ses servants. Bon, il nous espionnait, donc il n'osera probablement pas porter plainte.

Cette rivalité s'intensifie et commence à être une menace pour l'alliance. Des envoyés de Gigas ont découvert un Cercle de mes Filles, plus loin au Nord, vers la frontière Thrace. Les Tremere sont descendus et l'ont expurgé, massacrant toutes ses servantes. En représailles, nous sommes partis au Nord avec Discremen et avons détruit un de leurs villages et emmenés ses habitants. Le Criamon a gardé quelques otages, j'ai sacrifié les autres pour le repos de mes Sœurs. Destasia craint toutefois que certains de leurs Spectres ne reviennent nous hanter, jusqu'à ce que leur vengeance sur les Tremere ne soit mieux assouvie. J'ai essayé de la rassurer et j'ai passer plus de temps avec elle ces derniers temps. J'ai fait le serment que nous les ferons payer au centuple pour chaque cheveux d'une Sœur qu'ils ont osé toucher. Je sens qu'elle a parfois peur, maintenant que Megatheia nous a probablement quitté définitivement. Mais elle est désormais notre Matriarche et jamais je ne laisserais quoique ce soit lui arriver.

Je pars avec Discremen chercher des preuves autour du Sept d'Ohrid que les Bjornaers harcèlent nos alliés. Nous en avons à peine réchapper, mais j'ai empoisonné les rives du Lac Prespa, ces animaux pouilleux mettront du temps à s'en remettre !

Les Haruspexes m'alertent : les auras des collines ouest sont perturbées. C'est encore ce malade de Criamon. Il a pisté un Bjornaer qui s'était de nouveau aventuré sur le territoire de mes protégées. Ce fou lui tendu une embuscade et l'a capturé. La bestiole est dans un sale état : pas de retour en arrière possible. Je l'aide à ramener cette sale bête à Erebos et à le planquer dans une caverne reculée. Discremen veut l'étudier... Je serais plutôt partisan d'essayer de le livrer aux Filles, afin qu'elles aliènent son esprit, mais je me dis que le sort qui l'attend entre les mains du Criamon est encore pire et, d'une certaine façon, ça me ravit. Je pars dans les montagnes pour effacer au mieux les traces laissées par l'affrontement. Les autres chiens vont surement se mettre à la recherche de leur camarade à un moment ou un autre...

Au dernier Tribunal où nous les avons confronté, nous avons de justesse éviter la Guerre de Magiciens. Le prochain risque d'être encore plus mouvementé... Je ne peux vraiment encourager Destasia à renforcer les défenses de l'alliance, de peur de l'inquiéter et de l'impliquer. Alors je vais voir en catimini les membres des autres traditions, même s'ils ne m'apprécient pas toujours, et je tente des les inciter à mieux veiller sur leurs Cercles... Il faudra bien, qu'un jour ou l'autre, nous nous retrouvions tous face à face, pour régler définitivement cette querelle.

En attendant, je pars rendre visite à Nika à Thessalonique. Ses charmes exotiques me manquent et elle aurait des nouvelles croustillantes à me livrer...

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