C'est pas une réponse simple, donc tu l'auras voulu avec tes questions :
En juillet 972, loin de leur base du
Fraxinetum, [les Sarrasins] capturent Maïeul, abbé de Cluny [...] et le libèrent après avoir perçu une lourde rançon [...] mettant tout l'occident en émoi. Quelques semaines plus tard, Roubaud II, comte d'Arles au nom du roi de Bourgogne, et son frère Guilhem II, dit "le Libérateur", comte d'Avignon [...] expulsent définitivement les Andalous [...] et tirent profit du mérite de cette victoire et du contexte politique favorable.
En 972, la famille de Roubaud II et Guilhem II occupe des charges comtales de fraîche date. Leur grand-père, Roubaud, est le premier de la dynastie à porter le titre de comte, sans doute à la tête d'une des grandes cités de la Provence rhodanienne [...] ce dernier aurait des origines provençales ou septimanes : les rois de Bourgogne placent d'autant plus aisément leur confiance dans ce personnage qu'il appartient à une famille de second rang, étrangère à l'aristocratie d'empire qui conteste leur autorité au sud de la Durance. [Les territoires de Provence ont été envahi depuis le IXe siècle par l'aristocratie franque qui vient s'y tailler des domaines].
Les deux enfants de Roubaud Ier, Boson (942-966) et Guilhem Ier (962), deviennent respectivement comte d'Arles et d'Avignon. Il en va de même à la troisième génération, celle des conquérant du Freinet. [...] L'hérédité s'instaure de la sorte dans les plus prestigieux et prospères
pagi provençaux, épargnés des dévastations que connaissent les provinces ecclésiastiques ; c'est dans une sorte de cogouvernement que les deux frères dirigent en indivis ces deux comtés rhodaniens.
La victoire sur les Sarrasins renforce d'ailleurs l'autorité des comtes d'Arles et d'Avignon. Preuve en est le changement radical qui apparait dans la titulature des actes du cadet : en 972, Guilhem II apparaît pour la première fois avec le titre de "comte de Provence" ; en 979, il est appelé "marquis de la Provence arlésienne" ; en 991 "Prince de toute la Provence". L'octroi de ces titres apporte une légitimité au pouvoir que Guilhem et son frère -- seuls représentants du roi de Bourgogne dans une principauté où les sièges comtaux sont pour la plupart vacants -- exercent largement dans la pratique. Unifiant toutes les cités provençales sous sa juridiction, Guilhem II renoue avec une tradition qui le rend l'héritier institutionnel de l'ancien représentant du pouvoir impérial [...] disparu dans le marasme des invasions austrasiennes [càd franques, de chez nous en fait].
Toute la mise en scène qui accompagne la mort de Guilhem II témoigne de cette domination incontestable [...] L'hagiographe du célèbre abbé [Maïeul de Cluny] mentionne la foule qui se rend à la citadelle du Rhône [...] Entouré par la multitude de ses sujets, consolé par l'une des plus grandes personnalités de l'an mille, c'est en prince que le marquis de Provence passe de vie à trépas.
(Martin AURELL,
La Provence au Moyen Âge, Publications de l'Université de Provence, 2005, p. 10-14).
En gros, c'est un arriviste éclairé, issu d'une famille de parvenus, qui après s'être imposé par les armes, affirme son pouvoir politique
de fait.